Certaines personnes incarnent la réussite. A 49 ans, Christophe Lemery, père de 4 enfants et chef d’entreprise, termine sa sixième saison de triathlon (sa cinquième avec Trycoaching) et continue de progresser dans sa pratique sportive. On néglige souvent le rôle déterminant du processus dans la réussite, et je peux vous dire que cet homme n'est pas arrivé là par hasard.
Notre collaboration a commencé juste après sa première saison de triathlon, il y a 5 ans. Ingénieur de formation, le bonhomme ne laisse rien au hasard.
Dès ses débuts chez Trycoaching, il m’a impressionné par sa capacité à s'auto former, à mettre en application et à ajuster en temps réel.
Dans la nuit de samedi à dimanche, "papy" comme on s'amuse à l'appeler, nous a tous bluffés chez Trycoaching … Les deux autres Trycoachés du jour ont eu moins de réussite (Philippe BB essuie deux crevaisons et effectue les 60 derniers kms sur la jante, Guillaume aka "Cancé", encore Rookie chez Trycoaching, est en phase d’apprentissage).
Petit échange avec l'homme qui pour sa dernière année en 45/49 décroche en 9h19 une 92è place au scratch, et monte sur la 3ème marche du podium de sa catégorie ...
JT: Bonjour Christophe, raconte-nous ta course en quelques lignes.
CL: J’ai fait une course plus complète que d’habitude, et c’est ce qui m’a permis de rentrer dans le top 100 et de décrocher un podium auquel je ne pensais même plus après avoir vu la start list.
La natation reste mon point faible. 1h03, mais avec un parcours 2 à 3 mns plus rapide que d’habitude pour tout le monde, et ce sera un axe de travail pour la prochaine saison.
C’est sur le vélo que je fais l’essentiel de la différence. Je n’avais jusqu’à présent jamais réussi à tenir en course les allures que je tenais à l’entraînement, et je finissais toujours assez péniblement. Cette fois-ci j’ai fait une course pleine, et je réalise un des meilleurs temps amateurs (4h56) dans des conditions de vent assez difficiles.
Le marathon a toujours été mon point fort, et je boucle la càp en 3h12. Un peu moins bien qu’à Francfort (3h06) car j’étais en permanence au bord de l’hypo, et j’ai du courir 5 bpm moins vite que d’habitude.
J’ai compris au bout de 60 kms de vélo que j’étais dans un grand jour, lorsque j’ai commencé à doubler des gars qui posent habituellement le vélo 10mn avant moi, et que j’ai vu qu’ils n’arrivaient pas à suivre. J’ai même pensé à un moment pouvoir gagner ma caté lorsque j’ai réalisé que j’avais démarré le marathon sur les mêmes bases qu’à Francfort, autour de 3h05-3h06, sans être affecté par la chaleur, et que j’ai vu assez loin derrièreau demi-tour sur Ali Drive les gars qui avaient fait 1 et 3 à Francfort dans ma caté en 8h49 et 9h00.
JT: Ceux qui te connaissent bien et qui ont l'habitude de rouler avec toi quand tu es en forme ne sont pas si surpris que ça de ton vélo. Comment expliques-tu cette performance ?
CL: Nous avions à plusieurs reprises remarqué que l’affûtage en vélo, i.e la réduction très importante du volume sur les dix derniers jours, ne me réussissait pas du tout, me coûtait une vingtaine de watts, et que de plus j’avais de mauvaises sensations (pas de jus, fatigue musculaire sur la deuxième partie).
Nous avons longuement échangé sur le sujet et nous nous sommes décidés à prendre des risques en changeant l’approche. On a gardé un affûtage classique et court en càp, qui a toujours très bien marché, mais nous avons opté pour le schéma suivant en vélo (voir annexe) :
- 8 semaines de préparation plus 2 jours de repos juste avant la course
- S-8 à S-5 classiques (en moyenne 270 kms de vélo, 39 kms de càp)
- S-4 chargée (355 kms de vélo et 84 kms de càp, dont un big day).
- S-3 et S-2 très allégées en vélo (140 kms en vélo pour chacune) et plus chargées en càp (47 kms) mais avec un big day à chaque fois qui représente l’essentiel de l’entraînement de la semaine
- S-1 (pour être précis, J-9 à J-3) : un gros bloc à des intensités proches de celles de la course, dont une bonne partie sur place à Hawaii, avec au total 500 kms de vélo (2 sorties de 140 kms, deux sorties de 100 kms), 37 kms à pied.
- Charge hebdomadaire totale (y c natation) : 23h30 pour S-1, 20h50 pour S-4, et 13h00 en moyenne pour les 6 autres semaines. Donc S-1 a été (de loin) la plus grosse semaine, un pari pas très orthodoxe, mais très réfléchi
Résultat sans appel :
- Le relâchement en S-3 et S-2 m’a permis de bien me regénérer
- La surcharge de S-1 est du coup passée très facilement, je n’ai eu aucun mal à récupérer complètement en deux jours juste avant la course
- Je gagne 20w sur le parcours vélo
- Pas de coup de mou en vélo, pas de fatigue musculaire, et grande aisance musculaire sur le marathon (je n’ai en revanche pas réussi à m’alimenter suffisamment sur le vélo, d’où cette sensation d’hypo permanente sur la càp).
(Pour ceux qui souhaitent plus de détails, vous avez tous les entraînements de Christophe via Strava, tout en renseigné.)
JT: La course vélo GA est très souvent décriée, photos à l’appui, car on peut voir de gros pelotons façon "cyclosportive" sur la partie vélo. Avec la densité à la sortie de l'eau, c'est presque inévitable. Tu sors environ 800ème de l'eau, comment as-tu fait samedi pour être le plus clean possible vis à vis du règlement ?
CL: Les arbitres sont beaucoup plus présents et zélés à Kona que sur les autres courses (notamment Nice, Lanzarote et Francfort où il m’est arrivé de ne pas voir de motos pendant 3 heures d’affilée). Il suffit de voir les hordes de concurrents émargeant aux Penalty Box. Dès qu’on sort de Kailua et qu’on commence à rouler sur l’autoroute, les arbitres sont très présents, et ils n’hésitent pas à cartonner les groupes entiers. Donc oui il y a des pelotons, mais il y a aussi beaucoup de cartons ! On a vite fait de se trouver piégé dans un groupe, avec des gars qui doublent à droite, qui relancent lorsqu’on les double, qui bloquent, qui rentrent dans les zones sans doubler, etc. et si les arbitres arrivent à ce moment-là, c’est carton pour tout le monde, même pour ceux qui font de leur mieux pour respecter les règles. Le seul moyen de se mettre à l’abri d’un carton c’est de doubler les gros paquets, et c’est ce que j’ai fait cette année jusqu’au demi-tour à Hawi. Sur la deuxième partie, j’étais relativement isolé et le problème ne se posait plus. Mais pour faire ça, il faut une bonne réserve de puissance. J’ai passé 50mn au-dessus de 270w (pour 66kilos), dont 15mn au-dessus de 315w. A 250w, on ne peut pas lâcher les paquets. A 300w, plus grand monde ne suit. Dans la montée vers Hawi, je suis resté une bonne minute à 350w pour doubler une trentaine de concurrents ; j’avais une moto juste à côté de moi ; j’étais prêt à gicler à 400w si un concurrent s’était extrait du peloton pour pas que les arbitres puissent me reprocher d’être entré dans la zone sans doubler. Lors des trois participations précédentes, je n’avais pas la puissance nécessaire pour faire ça, et j’avais perdu pas mal de temps à me laisser distancer par les groupes qui passaient et ce afin de respecter les 10m et de ne pas me faire cartonner (NB je n’ai jamais pris de carton sur IM).
JT: Tu finis cette année en 9h19 à la 3ème place de ton GA, à un peu plus de 4mn du vainqueur. C’est une très belle performance, car c’était ta dernière année en 45/49 et à vos âges chaque année compte… Penses-tu pouvoir encore progresser ? et quels sont tes objectifs pour l’année prochaine ?
CL: L’expérience compte beaucoup sur IM, et compense en partie les effets de l’âge. J’ai validé un marathon en 3h06 à Francfort et un gros vélo à Hawaii. L’année prochaine j’essayerai de combiner les deux sur une même course, à Francfort puis Hawaii. Par ailleurs, nous avons beaucoup travaillé la technique en natation cette année, et je pense avoir progressé, même si ça ne se traduit pas encore par des gains chronométriques. Donc 2017 devrait être une grande année. Avec un peu de chance (il y a de plus en plus de vétérans talentueux, anciens triathlètes ou cyclistes pros), je devrais pouvoir viser la gagne à Hawaii en 50/54 et pourquoi pas le record de l’épreuve en 9h16, 3 mn de moins seulement que mon temps de cette année.
JT: Tu évolues tout au long de l'année au sein du groupe Trycoaching basé à Paris et aux alentours. Que t’apporte le groupe ?
CL: C’est un énorme plus. Le niveau du groupe est monté tout au long des cinq dernières années. Il y a maintenant un bon paquet de très bons athlètes, avec des objectifs ambitieux, et c’est très bénéfique de s’entraîner avec des athlètes meilleurs que soi. En 2015, ça m’a rendu fier et ça m’a fait rêver de voir 3 athlètes du groupe faire top 100 à Hawaii, et ça m’a encouragé à progresser. Le fait de partager pas mal de données avec les autres athlètes sur l’entraînement, le matériel, la nutrition, l’aéro contribue aussi à la performance. Mais le plus important à mes yeux, c’est l’amitié et la solidarité que les années ont tissées, la bienveillance et la bonne ambiance qui cohabitent avec l’émulation. Elles font de la pratique du triathlon en compétition un vrai plaisir. Il y a toujours des moments de découragement pendant la préparation et pendant les courses. Le petit mot d’encouragement ou de réconfort des copains peut parfois déplacer des montagnes, Savoir qu’on n’est pas seul, mais qu’on a tout le groupe derrière aide à se surpasser et à atteindre l’excellence.
JT: Le mot de la fin
CL: J’espère faire encore de très nombreuses saisons de triathlon au sein du groupe !
JT: Bonne récup, et merci de nous avoir fait vibrer, vivement l'an prochain, on en redemande ;)